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06/06/2015
La lutte contre le tabagisme serait-elle pilotée par le lobby du tabac ? - Auteur : Gérard Bianchi
Les documents exfiltrés des firmes américaines du tabac et exploités dans "TOBACCO DOCUMENTS" que l’on peut consulter en ligne sur le site "Legacy Tobacco Documents Library" (www.legacy.library.ucsf.edu) nous renseignent sur les différentes stratégies mise en place par les industriels du tabac américains pour maintenir leur chiffre d’affaire en dépit des polémiques engagées sur les risques en matière de santé publique.
Ces documents ont été exploités par les tenants de la lutte anti-tabac ("Golden holocaust : origins of the cigarette catastrophe and the case for abolition" de Robert Proctor, « Tabac, nos gosses sous intox » de Paul Moreira sur Canal+, et bien d’autres encore). Cependant personne ne s’est penché sur les relations ambiguës du lobby du tabac avec les instituts d’état chargés de la lutte contre le tabac.
En effet, les documents des firmes américaines du tabac, montrent que très tôt les industriels ont compris qu’il serait vain de mener une lutte frontale contre les scientifiques mais qu’en revanche, il serait intéressant et même très « juteux » d’utiliser les scientifiques et entre-autres, les spécialistes des sciences comportementales pour faire prospérer leur business.
En étudiant les motivations profondes des « addicts », les chercheurs ont découvert que l’une des motivations les plus importantes était « la pulsion de mort ». Des études ont été faites sur les étiquettes des boissons alcoolisées. Plus le « packaging » était morbide, plus il se montrait attractif. (les black-labels rappellent les suaires… la merveilleuse réussite de Guinness avec ses noirs et ses ors de corbillards etc…)
La stratégie des industriels du tabac américain a donc été d’utiliser ces découvertes. La dangerosité du tabac pouvait se montrer un très bon élément de marketing. Il ne s’agissait plus pour eux de nier la dangerosité du tabac mais de « déléguer » aux organismes d’état le soin de se charger de cette publicité morbide, eux se contentant de présenter le fait de fumer comme un « geste rebelle », une manière d’affirmer sa liberté face à une société toujours plus normative et intrusive dans la vie privée. A cet égard, l’apparition de l’inscription « Fumer tue » sur les paquets de tabac est l’une des plus belles réussites marketing de ces dernières années.
Dès lors, on peut s’interroger sur le rôle des instances gouvernementales sur l’augmentation du nombre de consommateurs de tabac et donc sur l’augmentation des bénéfices des industries du tabac, car les chiffres sont têtus. En dépit de 30 ans de « pseudo-lutte » contre le tabagisme, la consommation de tabac ( surtout chez les jeunes) n’a cessé d’augmenter. Ne devons-nous pas nous étonner qu’en dépit de son « insuccès » la même politique d’augmentation des tarifs et de messages morbides soit toujours en place ? Une stratégie inefficace est d’ordinaire remplacée an bout de deux ou trois ans. Les personnels sont remerciés et une nouvelle stratégie est mise en place.
Or, au bout de trente ans d’échec, la même stratégie est toujours en place, c’est bien qu’elle doit être utile à quelques uns. Cette « pseudo-lutte » anti-tabac ne serait-elle pas pilotée par les fabricants de cigarettes eux-même ?
Les lois toujours plus restrictives, les augmentations tarifaires ne sont-elles pas une publicité implicite pour le tabac ? N’assistons-nous pas à un numéro de clown blanc et de clown noir jouant chacun son rôle de « pseudo-antagonisme » pour délivrer le même message incitatif ?
En France la loi Évin qui interdit toute propagande ou publicité en faveur du tabac a fait économiser des sommes astronomiques aux industriels du tabac. C’est l’Etat qui prend en charge cette publicité par ses pseudo-campagnes « anti-tabac » qui ne seraient en fait que de la publicité déguisée. De plus chaque augmentation tarifaire soi-disant censée décourager les fumeurs, permet aux industriels d’augmenter leurs marges (+ 26% en 4 ans).
Il est bon de se souvenir que Claude Evin, le père de la « politique anti-tabac » était soupçonné par Michel Charasse alors ministre du budget d’avoir constitué un « trésor de guerre » pour soutenir la candidature de Michel Rocard. Il est bon de se souvenir qu’un certain Jérôme Cahuzac était alors membre de son cabinet et que Michel Charasse avait déclenché un contrôle fiscal contre lui.
Les revenus « occultes » que l’administration fiscale soupçonnait venaient-ils de l’industrie pharmaceutique, comme on le pensait à l’époque ou des industriels du tabac qui auraient trouvé chez les « vertueux anti-tabac » des « collaborateurs zélés » ?
Gérard BIANCHI
Ecrivain, auteur-compositeur-interprète,
04/06/2015